vendredi 4 janvier 2008

Le koi et le ai

Je lis en ce moment le petit dernier d'Amélie Nothomb, Ni d'Eve ni d'Adam. Amélie Nothomb, on l'adore ou on la déteste. La plupart du temps, je me situe dans la première catégorie. Mais on s'entend...j'aime l'auteure. La personne qui est une freak qui mange juste des légumes moisis, bof. Dans ce dernier roman, elle replonge dans l'autofiction et présente une partie de sa vie nippone parallèle à Stupeur et tremblements. Elle parlait du bureau dans le premier, elle parle ici de ses amours avec un Japonais qui baragouine le français.

Ce qui m'amène, évidemment, à vous parler d'amour, mon sujet favori. Toutes les fois que je trouve, dans un livre, un passage qui correspond à ma vision de l'amour, ça me fait plaisir, on dirait que ça me réconforte. Car il faut le dire, mon couple, dans un film, est celui dont on se dit "ayoye, je leur donne pas 5 minutes". Porc-épic et moi, avant de nous aimer, nous détestions avec délectation. Puis nous sommes tombés follement amoureux, la grosse passion et tout et tout. Ce qui ne nous empêche pas de nous détester encore et de nous transformer parfois en bêtes de cirque pour le vilain plaisir de nos amis. Notre amour n'est pas un amour graduel et doux, deux amis qui se découvrent un intérêt grandissant. Non. C'est plutôt le type je t'aime je te hais. Quelques fois, je doute. Suis-je maso ? Pourquoi ne pas être avec quelqu'un qui me ressemble, qui me comprend ? Un ami, avec qui tout serait plus simple ? Mais non, je l'aime mon Porc-épic, avec tous ses piquants...

Revenons à Nothomb...Dans son livre, il y a un passage qui m'a fait penser à mon amour. La narratrice évoque deux mots japonais : koi et ai. Le premier, difficile à traduire, serait l'équivalent de "avoir du goût pour quelqu'un". L'apprécier, être bien avec lui, avoir une affection sincère, une relation privilégiée. Ai veut plutôt dire "amour", au sens passionné du terme. Je vous en mets un passage.

"En japonais moderne, tous les jeunes couples non mariés qualifient leur partenaire de koibito. Une pudeur viscérale bannit le mot amour. Sauf accident ou accès de délire passionnel, on n'emploie pas ce mot énorme, que l'on réserve à la littérature ou à ces sortes de choses. Il avait fallu que je tombe sur le seul Nippon qui ne dédaignait ni ce vocabulaire ni les manières ad hoc."

La narratrice est le premier ai du Nippon. Il est son premier koi. Assez incompatible. J'en viens maintenant au passage qui m'a plu davantage.

"Entre ces deux mots, koi et ai, il n'y a pas de variation d'intensité, il y a une imcompatibilité esssentielle. S'éprend-on de ceux pour qui l'on a du goût ? Impensable. On tombe amoureux de ceux que l'on ne supporte pas, de ceux qui représentent un danger insoutenable. Schopenhauer voit dans l'amour une ruse de l'instinct de procréation : je ne puis dire l'horreur que m'inspire cette théorie. Dans l'amour, je vois une ruse de mon instinct pour ne pas assassiner autrui. Quand j'éprouve le besoin de tuer une personne bien définie, il arrive qu'un mécanisme mystérieux - réflexe immunitaire ? fantasme d'innocence ? peur d'aller en prison ? - me fasse cristalliser autour de cette personne. Et c'est ainsi qu'à ma connaissance, je n'ai pas encore de meurtre à mon actif."

Si je n'étais pas tombée amoureuse de Porc-épic, j'aurais très certainement fini par l'assassiner. Et il n'est pas dit que le jour où je ne l'aimerai plus, je ne le ferai pas. Je me suis toujours sentie une excellente candidate au crime passionnel. ;-)

Et vous ? Votre amour est un ai ou un koi ? L'amour arrive-t-il toujours en coup de vent ou peut-il être une douce vague ?

1 commentaire:

Kara a dit…

Moi, je pense que l'amour se traduit par une douce vague. Pour moi, en tous cas. Je pense qu'on a tous notre seuil de "tolérance" à l'amour, et c'est pas tout le monde qui est à l'aise avec l'amour "doux".
Je pense par contre que quand on vit l'un, on ne peut pas vivre l'autre. Et une chance, parce que si seulement l'un des deux existait, tous les adeptes de l'amour "coup de vent" seraient malheureux longtemps...

En tous cas, moi mon chéri je ne l'échangerais jamais contre un amour coup de vent ! :-)