dimanche 17 avril 2011

Chagrin multicouches

Vendredi, j'étais en sortie avec l'école. Une de mes élèves a passé toute la journée à pleurer dans un coin parce qu'elle avait égaré une petite somme d'argent. Ça semble banal. Mais pour elle, c'était la goutte de trop dans un immense vase. J'ai essayé d'être là pour elle. De la convaincre de me laisser lui donner l'argent perdu. De l'échanger contre services rendus, genre nettoyer les pupitres. Rien à faire. J'ai essayé de la faire sourire en lui racontant la fois où 400$ sont tombés de mes poches. J'ai essayé de comprendre sa détresse, de la pousser à m'expliquer ce qui se passait. Elle était fermée comme une huitre. Après quelques minutes de silence, elle m'a dit que la personne qui lui avait envoyé cet argent d'Haïti était comme un père pour elle. Après plusieurs autres minutes de questions et de silence, juste comme j'abandonnais et je ne savais juste plus quoi dire, elle m'a dit en pleurant qu'elle venait d'apprendre qu'il avait pleuré comme un bébé quand il avait su qu'elle avait été hospitalisée en décembre. Et qu'il lui avait menti quand elle lui avait demandé s'il avait eu le choléra. Je l'ai prise dans mes bras, et elle a pleuré trois fois plus fort.
Je la comprends. Moi aussi, la gentillesse me fait pleurer encore plus. Mais c'est la seule chose que je comprends vraiment. Sa peine est beaucoup plus profonde qu'elle n'en a l'air. Elle prend racine dans des horreurs comme je n'en ai jamais connu et n'en connaitrai probablement jamais.

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